Billets d'Humeur

Les brèves (pas tant que ça !) de la mouette rieuse

Et si l’on avait écrit Brexcite au lieu de Brexit ?

Et si telle avait été la question, ce serait-elle vraiment posée ? Sans doute que oui, d’ailleurs, voire même, de leur besoin de se la poser comme beaucoup d’autres dans les autres pays, n’est ce pas Marine ? Comme s’ils répondaient avec un peu de retard à l’invective célèbre : « Messieurs les Anglais, tirez les premiers ! ». - Je vais me gêner, a répondu la fière Albion , en disant oui au brexit ! Et chacun d’y aller de son commentaire, moralisateur pour la plupart, et, sauf mal informé, aucune réponse formelle à l’attente existentialiste de la question venant de la communauté européenne, unanime et surtout convaincante, excitante pour surfer sur mon … « brexcite ». Jusqu’à cette analyse aussi « doctrinale » que surréaliste, dirais-je, de Jacques Attali qui me fait réagir.

Malgré le respect et l’admiration que j’ai pour ses travaux et sa contribution à la réflexion collective, il me semble que là, il tire un enseignement qui s’oppose aux « Lois » de l’Evolution. Je vous rappelle ses propos qui me font prendre la plume et pour être complet vous propose de les relire dans sa tribune où il veut tirer leçon de la démarche anglaise. « Certes, écrit-il, il a toujours été admis qu’en principe, en démocratie, le peuple peut décider de tout. Il n’empêche : selon notre conception occidentale du droit, il existe des progrès irréversibles, (par exemple, la démocratie, la liberté du culte, l’interdiction du travail des enfants, l’abolition de la peine de mort) qu’un vote simple ne peut défaire. Admettre qu’on puisse remettre en cause des acquis, revient à nier la notion même de progrès ». L’acquis et le principe de sa remise en question sont en réalité les points d’achoppement sur lesquels j’ai besoin de manifester mon désaccord parce qu’ils sont en opposition avec mes « fondamentaux » :
– Rien n’est immuable dans la nature,
– Ce sont les accidents qui ont fait l’évolution par la règle de l’adaptation, JAMAIS la rigidité.

critères de décision

Sur la base de ces deux incontestables constats (sauf croyances diverses), je me permets de poser les questions suivantes :
1. Quels sont donc les critères avec lesquels pourrait-on prétendre qu’une chose est acquise une fois pour toute ? En quoi l’abolition de la peine de mort est-elle un « acquis » irréversible ? Au nom de quoi ne pourrait-elle l’être dans l’escalier de l’Evolution ? Pourquoi rajouter « de culte » à la liberté, puisqu’elle se régule par sa mise en œuvre dès lors que la liberté de l’un empêche celle de l’autre. La notion en elle-même porte ses acceptations. C’est sa mise en œuvre qui doit être régulée, c’est-à-dire, traitée : si telle est « l’acceptation » y déroger est une sortie du système. Quelles ont sont les conséquences ? Pour soi, sa famille, quelques autres et/ou tous les autres. Rien qu’avec cette « mesure » sur l’impact, on peut créer une échelle de criticité, surtout si l’impact est définitif ou non. D’ailleurs, implicitement, cette échelle se retrouve dans la nature et la Loi de l’Evolution.
Mais comme beaucoup de ces principes, ils ne sont pas sujet d’éducation structurant ni d’enseignement d’acquisition de compétences, alors il faut bien « réguler ». Mais est-elle un acquis irréversible ? Puisque la « civilisation » ne serait-ce qu’européenne, n’en fait pas encore universellement une marche de progrès, ce n’est pas encore acquis, ni irréversible. Aucun des exemples cités ne l’est d’ailleurs, car l’échelle de temps pris en considération n’est pas le même et surtout pas le même pour tout le monde.
Ce n’est, en tout état de cause, pas une loi qui fera que les choses iront mieux ou seront acquises. La loi n’écrira qu’une règle convenue pour fonctionner selon elle un moment puis elle se défait. Rien à voir avec l’aspect définitif d’une marche que l’on ne redescend pas sur le grand escalier de l’évolution. Si vous avez un doute demandez aux dinosaures et aux mammouths pourtant ils avaient, eux, des « arguments » pesant pour imposer leur « loi ».

Progrès

2. Pourquoi un « progrès » doit-il être définitif pour être considéré comme tel ou en quoi le fait de remettre en cause un acquis c’est nier en soi la notion de progrès ?
Là encore, remettre en cause l’énergie fossile voudrait laisser entendre de nier le progrès qu’elle a été pour les décennies passées ? Remettre en cause les antibiotiques nier l’avancée significative pour notre Santé ? Quand Monsieur Attali poursuit son article en ces termes : « Admettre que rien n’est acquis, peut conduire, à revenir au temps où la raison et la liberté étaient écrasées par la foi et le fatalisme et, en utilisant les armes de la démocratie, à la détruire », il démontre en fait que c’est l’usage qui en est fait par les uns ou les autres plus que le principe lui-même de la remise en cause qui fait la question.

Il est peu crédible d’opposer une Loi à une dérive, le droit français et ce qui en est fait en réalité le démontrent suffisamment puisque nul n’est sensé l’ignorer mais tout le monde cherche à la contourner. Si la préoccupation de tirer leçon de ce référendum est nécessaire, il me semble que l’une des premières comme évoqué, c’est que la remise en cause de ce qui est acquis est possible et doit l’être en soi, parce que c’est l’une des clés sur lesquelles se définit justement l’Evolution. Toute évolution de façon factuelle voire naturelle passe par une phase d’essai avant d’être adoptée comme une marche entière de cet interminable escalier de l’Odyssée. Il me semble qu’elle n’obtienne son statut « d’Evolution » qu’en ayant passé, après la phase d’essai, celle structurelle du « résultat » tangible et de sa récurrence et ceci, quelle qu’elle soit dans les trois mondes dans lesquels nous vivons : le minéral, le végétal et l’animal auquel nous appartenons. Cette Evolution se traduit par la Loi de la transformation identifiée et organisée par les anciens Egyptiens déjà : le minéral se transforme par l’érosion et les mouvements des plaques terrestres ; le végétal se transforme par la Vie et son objectif de reproduction en dépendant des éléments pour sa pollinisation ; le monde animal se transforme par la Vie et son objectif de reproduction par l’accouplement que le mouvement autorise. L’Homme s’y est donné une dimension spirituelle qui complète sa quête d’un idéal. C’est cette transformation que j’appelle « accident » dans l’adaptation.

les motifs de l’évolution

Mais cette quête, cet escalier de l’Evolution qu’il a entreprit de gravir l’a été progressivement en tâtonnant, en faisant et redéfaisant, en essayant et ceci par trois leviers :
– L’évolution par adaptation ou dérive, reproductible ou non, mais surtout améliorant une fonction ou non, donc progrès ou non. Darwin est là pour nous le résumer.

– L’évolution par invention ou découverte, permanente ou non, mais surtout utile collectivement ou non, donc progrès ou non.
Prenons l’une des dernières « inventions» à la portée de la voix pour communiquer entre nous : le téléphone cellulaire. Je n’ai entendu personne dire « exit » de l’univers téléphonique sans fil trop excité de son usage et de la liberté qu’il procure. Faut-il une loi pour l’adopter, un critère pour le rendre irréversible : Il suffit en soi pour ne poser aucune question. Mais le jour où l’on aura compris comment marche la télépathie de façon reproductible et « sécurisée », remettre en cause le téléphone cellulaire voudra dire renier le progrès ? Ce qui est « acquis », par contre, c’est le fait de pouvoir téléphoner du bord de ma piscine à New York à un correspondant au milieu de Central Park avec juste un morceau de plastique bourré de technologie collé à mon oreille ! Je n’ai pas envie de descendre cette marche de progrès-là !
Pas un britannique non plus.

– évolution par intention ou déduction, partageable ou non, mais surtout contributive à l’amélioration de la Vie de l’espèce ou non, donc progrès ou non. Les exemples sont légion, y compris ceux pour lesquels personne ne réclame un retour après leur abandon.

Ou non signifie tout aussi fondamentalement que rien n’est immuable dans la nature pas même la Vie : quand le soleil s’éteindra, la Vie telle que nous la connaissons devrait s’arrêter, elle aussi, puisque les conditions qui en font son existence aujourd’hui ne seront plus disponibles.
Ou non signifie tout aussi fondamentalement que l’abandon d’un « essai » ou d’une évolution agréée un moment puisse être décidé ou ne pas être retenu par la majorité (la plupart) pour en faire une marche qu’on ne redescend pas.
Ou non signifie tout aussi fondamentalement qu’il y a une « entité » ni formelle ni structurée, ni limitée, ni rigide, ni configurée ni déterminée qui décide du statut de « Marche » d’une évolution ou non, simplement parce qu’elle répond collectivement ou non à l’une des trois natures :
– d’où les questions sur l’environnement qui évoluent en fonction de la Connaissance voire de la Conscience plus ou moins collective,
– d’où les questions sur la société qui évoluent en fonction des réponses qu’elle est capable de donner qui, elles-mêmes, évoluent en fonction de l’augmentation de la population et de la vitesse avec laquelle elle peut comparer le niveau et la qualité des réponses que les différents modèles lui donne ou les pouvoirs qui les pilotent veulent bien lui donner,
– d’où les questions sur la gouvernance et le pilotage de la nef Terre qui s‘emmène où dans l’espace-temps ? Les réponses des différents Dieux qu’elle s’est inventé pour répondre à ces questions ne satisfont plus, confrontées à tant d’approximations et d’incohérences après tant d’énergies et de prières formulées pour un monde meilleur. Par exemple, s’il y a une vie après la vie, comment se fait-il que personne ne soit revenu nous le montrer. De mémoire il n’y en a qu’un mais en a un sérieux doute sur les témoignages qui sont venus jusqu’à nous. Ah s’il y avait eu le portable pour prendre une photo ! Alors qu’un autre disait : crois en Dieu, mais attache ton chameau d’abord !

Alors Monsieur Attali, la leçon à tirer du Brexit est pour moi simplement une question d’écriture. Si l’Europe était une réponse excitante pour le britannique il n’y aurait pas eu de question. Comme toute marche de l’évolution. Brexcite ? And I believe, Yes we can !
Je ne connais aucun Etat Américain qui affiche un « brexit » des Etats Unis d’Amérique, un USAexit, parce que, en soi, USA n’est pas un nom mais un projet ! ce qui pourrait être une piste : et si on changeait le nom de l’UE par les USE (united states of Europe) ? En parlant de projet pour des Etas Unis, faudra-t-il (re)passer par notre guerre de sécession à nous, type 39/45, ou est-ce qu’elles valent pour ?
Mais sans excitation pour le projet USE, on peut d’ores et déjà annoncer la nouvelle ! Rigidités quand tu nous tiens….

– Y a-t-il une vie après la Vie, Maître ?
– La réponse t’empêche-t-elle de vivre pleinement dans celle-ci, Disciple ?
– Non, mais elle peut donner du temps pour dans la prochaine, Maître ?
– Tu m’annonces donc que tu es déjà résigné à finir celle-ci inachevée, Disciple ?

Juillet 2016

Gérard Leidinger

Posté le 1 août 2016
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