Billets d'Humeur

Les brèves (pas tant que ça !) de la mouette rieuse

Fragments Osés N°1 : Annuler la Dette

Puisqu’il est judicieux pour évoluer de « think out of the box » disent les Anglais, je vais oser braver l’orthodoxie du discours de Christine, la grande prêtresse si bien nommée pour la garde des tables de la loi du dieu Argent. Il m’apparait, en effet, que pour que les choses changent sous les impacts écocides, le mécanisme de la Dette doit être abrogé. Annuler la Dette est l’une des mesures indissociable de l’indispensable changement de paradigme à engager pour engager la capitulation de l’absurdité de notre mode de vie. En tous cas, l’un des fragments à oser dissoudre de notre ancien Monde économique. Rien ne pourra en inverser la tendance, moins encore la Décroissance qui ne pourra que renforcer la pérennité de ses méfaits, sans sa suppression. A plus d’un titre, l’option est salutaire.


Au titre de l’immoralité derrière la moralité apparente

Avec ses cheveux gris si bien rangés que l’annulation risque de lui blanchir, la grande prêtresse oppose à l’option, l’immoralité de la démarche puisqu’une dette s’honore, requière-t-elle. A priori, en effet, et d’un point de vue éthique, c’est de confiance dont il est question et tout le système repose sur elle : la croyance dans sa convention sur une valeur fluctuante certes, mais négociée, donc tacitement convenue dans l’orthodoxie partagée. S’y soustraire, c’est le démonter et, surtout, le rendre « impraticable ». D’où la moralité requise et la pudibonderie pour s’en offusquer, sauf à y dissoudre quelques fragments durs, sur lesquels l’apparente moralité, fait reposer ses vociférations d’indignité, très discutables toutefois :
1. Tout le système s’est organisé pour perdurer sur la base même du mécanisme de la Dette, en s’arcboutant sur le dogme absurde et infondé de la Croissance. En la pointant comme une loi vitale et incontournable, ce qui n’est pas le cas, on fausse le mécanisme du jeu jusqu’à son objet même. Est-ce bien moral, alors, de proposer de jouer rigoureusement avec des cartes faussées à un jeu d’attrape-nigaud menteur ?
2. Le système en lui-même s’est construit progressivement sur les deux réponses aux aspirations obsédantes de l’humanité depuis ses origines : la réduction de ses incertitudes par l’augmentation de ses connaissances et celle de son inconfort par l’amélioration de ses conditions de Vie. Le système économique s’est installé à leur croisée pour en faciliter les transactions et, aux constats des progrès certains, engrangés facilement, s’est vu confisqué par les sachants et les tenants à leur profit exclusif : la partie congrue du ¼ de l’Humanité au mépris sans partage des ¾ restants. Moral, ça ?
3. Et comme s’il était besoin de donner bonne conscience à cette option de rééquilibrage, quelle morale à défendre de la part des conquistadors et de leurs descendants, tenants entreprenants, en observant leurs indigne perversité d’irrespects, de pillages et de barbaries, tout au long de ces derniers siècles de colonialisme ? C’est sur ces fondements que le système économique s’est installé et se poursuit sur une honteuse asymétrie des valeurs sociales qui nourrit par cynisme et mépris persistant l’exigence de rigueur du jeu, aux cartes faussées, devenu mondial et omnipotent. Et elle ose s’offusquer d’immoralité !

Au titre de l’insoutenabilité derrière la loi apparente
Au travers des préceptes avisés et fondateurs des prophètes économiques successifs que les circonstances et les manquements ont générés pour ajuster, contredire, réorienter ou amender les rituels ou les analyses, on ne peut que convenir que le système n’est pas le fruit d’une Loi immuable comme celle de la nature où rien ne se crée, rien ne se perd mais où tout se transforme. Il est, bel et bien, un insoutenable amalgame de conventions, aussi contradictoires qu’opportunistes selon les convictions et les appétits du pouvoir qui dispose des moyens de se l’asservir.
Il en découle, instantanément, une autre forme de déférence, une autre crédibilité sur les impacts, mieux encore, une ou plusieurs alternatives à l’insoutenabilité du constat :
1. Au regard de la technologie sur laquelle il repose, la croissance illimitée n’est pas soutenable puisqu’elle dépend de ressources qui, elles, sont limitées. Tôt (de préférence) ou tard (mais pas tant que ça), le château de cartes truquées, va s’effondrer sur ses propres fondements improbables. En découlera un inévitable recentrage sur le « suffisant » si on prépare, voire sur les « ruines » si on ne le construit pas.
2. Au regard de la dimension sociétale que le système économique déséquilibre outrageusement, les amas et les gaspillages du ¼ de l’humanité ne sont pas soutenables puisqu’ils ont pour objet de faire perdurer le système contre vents et marées et non plus de répondre aux aspirations originelles de toute l’humanité. Pire, ils consolident de bric et de broc le château de carte sur le mépris et l’irrespect des autres et de la Planète. L’asymétrie va nécessairement s’effondrer sur ses propres fondements d’injustice sociale. En découlera un inévitable recentrage par la « responsabilité » politique si on s’y attelle, voire sur la « barbarie » si on ne réagit pas.
3. Au regard de la dimension écologique que le système économique et la technologie n’ont pas intégrés dans leurs schémas mercantiles, force est de constater qu’ils ne sont pas soutenables en l’état puisqu’ils impactent violemment et irréversiblement les équilibres de la Biodiversité indispensable à la Vie elle-même. Tôt (c’est en cours) ou tard (mais pour partie déjà avérée), l’invraisemblable schéma va se gripper du fait de ses propres fondements irréfléchis. En découlera un inévitable recentrage par la « conscience » publique si on s’y met tout de suite, voire par la « contrainte » si on ne le fait pas.

Au titre de la durabilité derrière l’immoralité apparente
Ressortez donc du formol les prophètes économiques dont je n’ai pas évoqué les noms pour ne pas qu’ils se brisent leurs auréoles en se réveillant brutalement ou interpelez leurs disciples de toutes les obédiences pour reconsidérer les réponses et leurs déviances aux questions originelles : incertitude par adaptation au lieu de recherche de maîtrise prétentieuse et inconfort par contentement au lieu d’une fuite éperdue dans l’abondance et la gabegie. A la lecture de l’immoralité et de l’insoutenabilité, la circonscription du système économique d’une prospérité durable se dessine clairement autour de cinq aspects qui structurent, pour moi, l’annulation de la Dette :
1. L’institution du dogme du contentement pour remplacer celui de la croissance. Il induit une échelle de criticité universelle à 5 échelons depuis vital à facilitateur pour la rendre équitable, consensuelle et opérative (vital, nécessaire, utile, aidant, facilitateur).
2. La règle de la « suffisance », équilibre entre besoin et disponibilité durable, annihile l’objectif de profit pour le remplacer par celui de stabilité. Ainsi l’entreprise équilibre son exploitation pour sa pérennité et non plus pour sa croissance inutile, moins encore, pour l’augmentation de ses profits, devenue sans objet.
3. Cette stabilité annihile à son tour toute velléité de fluctuation spéculative qui impacte la fixation d’une valeur dans la durée. La valeur intrinsèque de la pomme sur son pommier ne fluctue pas, n’est-il pas, alors pourquoi y recourir ?
4. La fixation d’une valeur sans spéculation rend caduque la nécessité de monnaies volatiles les unes par rapport aux autres dont la valeur de « représentation » se recale sur la valeur du besoin (échelle) et non plus sur un rapport de force spéculatif abstrait. Brut.
5. La valeur du besoin étant définie selon sa criticité sur l’échelle de contribution au Vivant et de suppression des impacts écocides, le système économique retrouve son objectif initial : donner pour toute l’humanité la possibilité à chaque individu de trouver l’utilité qui vaille le plaisir suffisant à son existence (satiété, sérénité et équité).

Prophètes économiques, enlevez votre cape d’escronomistes magiciens comme dit Jean Latreille, et considérer les cinq aspects pour repenser les règles du jeu dont le but devient celui de la prospérité durable entre l’économique, le technologique et l’écologique pour toute l’humanité ? C’est cette dimension qui donne le sens essentiel à la prospérité durable et non pas la dimension matérielle du plus que l’on pourrait y entendre. Cette nuance porte, de surcroît, son fondement d’insoutenabilité intrinsèquement, car il ne s’agit pas de promettre le niveau de vie surabondant de l’Américain à tous les humains, incompatible avec les ressources disponibles limitées. Il faudrait 2,5 terres pour y parvenir, dit-on !
Ce qui signifie que le suffisant se redéfinit avec les mêmes critères de criticité consensuels partout, mais selon les cultures. Regardons du coté du Bhoutan, par exemple, et comparons, ajustons, etc…out of the box du dieu Argent, Christine.

Au fait, suffisant, c’est combien d’individus heureux de l’espèce du Bipède dans la biodiversité ? La Nature s’est forgé la régulation pour la préservation des équilibres sur des millions d’années, pas la croissance illimitée.
Et nous, Bipèdes, sur moins de 300 ans, nous prétendons, malgré les dégâts, pouvoir s’en affranchir ?

Gérard Leidinger
Auteur de Clitoyens, prenons en main notre Vivre Bien

Posté le 17 juillet 2023
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