Billets d'Humeur

Les brèves (pas tant que ça !) de la mouette rieuse

le Bon, l’Abrupt et le Brûlant

Un peu comme dans un western de Sergio Leone, l’Odyssée de l’évolution de l’humanité écrit en direct le scénario de ses aventures en faisant quelques ratures et en laissant quelques indécis freiner des deux pieds pour essayer de conserver ce qu’ils ont pu en obtenir à un moment. Les ratures fabriquent des désordres plus ou moins «déstabilisants » dans les esprits, voire dans les chairs, et les freins labourent des ornières plus ou moins « profondes » dans les convictions, jusqu’à devenir conflits.
Le bon côté des choses, c’est pour évoluer, dit-on. L’abrupt, c’est que tout est en marche et s’accélère, inexorablement. Le brûlant, c’est nous qui sommes « concernés » (écrit en deux mots ?)!

Il faut être très optimiste ou aveugle ou encore croire avec acharnement en la Vie pour trouver un bon côté aux choses que nous vivons depuis quelques années, diront les plus nombreux. Certes, ce n’est pas facile de penser autrement en additionnant les informations et les images diffusées, elles, pour vendre d’ailleurs, peut-être pas que pour informer. Moins nombreuses sont les diffusions des choses « optimistes » mais, allez savoir pourquoi, elles sont considérablement moins productives financièrement pour qu’il y ait le même acharnement à les promulguer ! Et pourtant, en regardant de plus près, nombreuses sont les initiatives de tous poils qui naissent et se développent pour contredire les premiers. C’est entreprendre un parcours du combattant que vouloir discerner la part d’info de celle de l’intox : je ne vais pas faire un inventaire à la Prévert, vous savez bien ce qu’il faut en déduire.

Malgré tout, très lucidement et très objectivement, globalement toute cette information, même sectaire, nous force à constater qu’une chose  significative est acquise en soi : tout le monde accepte, bon gré malgré,  que les choses ont changé ou sont en cours de mutation. Il n’est donc plus utile de faire la preuve de cet encours, ni de la nécessité de son corollaire, s’adapter, même s’il faut encore dans certains secteurs comprendre ce qu’il est, ce changement, ou ce qu’il en advient puisqu’on le crée en même temps qu’on se le donne. Comme le service, le changement a cela de particulier par rapport au produit manufacturé, en effet, il se fabrique en même temps qu’il se consomme. Dès lors, une rature, parce que la réponse n’était pas ajustée, et voilà l’impatience qui s’installe, la frustration qui cristallise et l’absence de gouvernance crédible qui dégénère en conflit !

– L’impatience, parce que le « tout de suite » est devenu le mode de consommation supermarché : on se sert dans le rayon et ce n’est que pour de très rares achats que l’on accepte la commande à condition que ce ne soit pas trop long. Merci Amazon ! Seuls les fanatiques accrocs attendent la livraison de leur Mercedes personnalisée près de huit mois ! Comme on n’est pas des fanatiques accrocs mais dans la difficulté, la solution sur le rayon, on prend volontiers dès qu’on croit trouver !

– La frustration parce que la solution du rayon une fois essayée ne fonctionne pas et génère des dommages collatéraux qui complexifie le confort assisté dans lequel on s’était installé : tout d’un coup, il faut à nouveau se prendre en main, et donner de son temps, de son énergie et de sa responsabilité pour participer à la résolution du problème généré par le changement. Le coupable n’est pas connu parce que tout simplement il n’y en a pas : alors, on invoque le temps, l’Etat, les autres, l’étranger pour ne citer que les plus commodes, mais certainement pas notre angoisse propre ou notre frustration de nanti assisté (ca c’est peut-être un peu abrupt, mais…un peu vrai quand même !) !

– L’absence de gouvernance parce que le pilotage de la cohérence entre le neuf et l’ancien, le tri entre ce qui change et ce qui existait ne sont pas organisés et personne ne nous a donné les clés. L’innovation, par nature, est une impulsion donnée à une situation nouvelle et/ou existante qui fait rarement l’objet d’une évaluation globale : en quoi est-elle innovante et quels sont ses impacts sur l’existant ? Uber et les taxis ? Le télétravail et le code du travail ? Le numérique et les métiers ? La mondialisation et la concurrence ? L’Europe et la France ? Qui pilote et en fonction de quoi ce qui doit advenir pour le mieux de tous ? Pourquoi toujours avec un temps de retard ?

Mais ce qui est bon, c’est que tout le monde sait qu’on y va dans demain et qu’il sera différent.

Pour du mieux ?

 

Pour pouvoir répondre à la question, en dehors de prier, c’est de considérer, et on acceptera après ou pas, qu’il est d’abord question de se mettre d’accord sur ce qui est mieux: ça commence où ? Il est idiot de comparer la voiture à cheval du 19ème siècle avec la voiture à vapeur du siècle dernier ou l’automobile aujourd’hui. Idiot parce qu’inutile et sans aucun sens, sauf si on lit l’évolution du point de vue de la mobilité, par exemple. L’abrupt du constat est de continuer à regarder les choses d’un point de vue politique avec une sclérose née dans les états généraux de 1789 : les nobles à la droite du Roi, le Tiers-Etat à la gauche, le clergé au Centre ! Qui s’en souvient pour continuer à vouloir lire et parler de la gauche et de la droite avec cette donnée héritée ? N’est-il pas tout aussi idiot de vouloir conserver le regard politique des choses avec cet angle ?  D’autant qu’avec le temps, le concept s’est « simplifié » dirais-je par commodité, la gauche pour abolir les Privilèges comme le Tiers-Etat à l’époque, la droite pour les conserver et leur extrême respective pour en exacerber le processus dans le sens attendu. C’est là que tout s’écroule brutalement parce que le concept même de privilège est absurde : à y réfléchir deux secondes (pas plus) il ne repose sur aucun fondement objectif qui puisse permettre d’en décréter une légitimité, aucun critère de décision qualifiant pour en tirer un quelconque aspect utile. Privilèges de la fonction publique en CDI à vie ? Privilèges des Elus ? Privilèges de corporations au regard de la retraite ?  Et au regard des quelques exemples que je viens de citer, le privilège en soi empêche la société de fonctionner : ils transforment le changement de la case de naissance en Odyssée d’Ulysse, ils entretiennent une attitude d’assisté en neutralisant le goût de l’effort et en sclérosant l’innovation, alors que justement, ils n’ont de sens que dès lors qu’il y a nécessité et espoir de progrès.

 

Qui donc va oser les abolir car ils sont un obstacle au bon fonctionnement de la société qui s’en est insidieusement accommodée depuis avoir fait sa Révolution, comme le voudrait les extrêmes de gauche ? Qui va donc oser les allouer à tous comme le voudrait les extrêmes de droite, ou est-ce le contraire ? D’une façon ou d’une autre, la question pour trancher l’orientation sur les privilèges est une fois de plus simple. Sachant que les privilèges subsistent de droits alloués par le Roi, soit d’acquis obtenus de hautes luttes de classes, soit de décrets de fait induits par le pouvoir de l’argent, il n’en est qu’un : l’intérêt commun « finançable ». Pour illustrer mes propos : comment ne pas accorder les « privilèges » (par rapport à d’autres mondes ?) que sont l’accès de tous au parler, compter, écrire et à la culture, à la sécurité, à la santé, à la formation permanente et au logement ? Comment ne pas les abolir lorsqu’il est économiquement impossible de les généraliser comme les statuts des élus, les régimes spéciaux de retraite ou des rentes de toute nature pour ne parler que de ceux qui arc-boutent les opinions. Oserais-je dire en poussant le bouchon pour fâcher un peu, que le CDI pourrait en être un si, en même temps que de vouloir répondre au besoin de flexibilité, on ne réponde pas au besoin de stabilité requis par le banquier pour accéder à la propriété. En soi le CDI n’est pas un privilège mais une réponse à un problème qui n’en est pas un par rapport au statut social qu’il attribue et la sécurité de l’emploi qu’il semble devoir préserver mais bien à son interdépendance d’avec le système qui lui attribue des vertus qui deviennent « obsolètes » parce que le monde change.  Avec ce regard-là, la question sur le temps de travail et la « guéguerre » structurelle qu’elle déchaîne a-t-elle, elle aussi, encore un sens ?

 

C’est bon quand le résultat est satisfaisant, c’est abrupt quand on ne s’y attend pas, c’est brûlant quand on n’a pas pris le train, ou qu’on n’est pas monté dans le bon wagon !

Le bon, l’abrupt et le brûlant, c’est l’histoire d’un projet de société qu’il va falloir oser engager à la fois à un moment où tout nous oblige à le faire et à la fois d’une autre façon que celle de le faire pour s’adapter au monde qui change. Pour cela, il n’existe qu’une façon de faire: oser penser autrement que…  comme d’habitude ! Mais ce n’est pas la musique d’Ennio Morricone pour l’histoire qui s’écrit…

 

Chaud ! C’est brûlant parce que c’est dans un an ! Chaud devant !

 

  • L’habitude ça commence quand, Maître ?
  • Quand tu fais les choses de façon répétitive en ayant perdu leur sens, Disciple !
  • Mais je mange trois fois par jour, Maître ?
  • Oui, mais as-tu besoin des trois pour te nourrir, Disciple ?
Posté le 10 mai 2016
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