Billets d'Humeur
Les brèves (pas tant que ça !) de la mouette rieuse
Les dix Fondements de nos Désillusions
Dans l’utopie du toujours plus et du beaucoup mieux, chacun fait ce qu’il peut pour en tirer le maximum à son profit en laissant au hasard des circonstances le soin de produire les équilibres et les adéquations dont il est besoin pour le bien de la Collectivité et de l’Environnement. Si bien que les choix sont conduits pour se satisfaire soi, quitte à ce que ce le soit au dépend des autres, au nom d’une irresponsable ambition, d’une alarmante vanité, voire d’une illusoire liberté. Difficile et inconsidéré est le chemin qui pourrait nous mener à la dignité.
A l’image des Dix Commandements qui nous proposaient un consensus pour nous aider à nous conduire, je vous soumets mon entendement de l’atmosphère improbable telle qu’elle s’enfle, à l’appui de dix « fondements » que je comprends comme étant ses racines. Il me semble nous devoir le faire puisqu’ils fondent nos certitudes et nos convictions avec lesquelles nous nous déterminons, alors qu’ils sont inacceptables puisque disloquant et irrésolvables puisque discordant, si nous voulons que les choses changent et servent utilement le « plus » et le « mieux » souhaités qui s’en raisonnent, je crois, en « suffisant » et « bien » à leur analyse. Faites précéder chaque « fondement » de : « je fais le constat d’échec collectif parce que … » et votre regard se relativise pour nuancer votre jugement et élargir un peu les champs de nos possibles. Et si l’exercice vous inspire, osez convenir de critères mesurables et non pas illusoires comme « trop » (ça commence à combien, pour tous ?) ou « injuste » (selon qu’elle loi de vie convenue, par tous ?) ou « acquis » (rien n’est immuable dans la nature, non ?), pour nous tracer le chemin de cette dignité. C’est dire l’effort à fournir :
1. Chacun a sa définition malléable des valeurs de la République et sa perception de l’insatisfaisant est basée sur un jugement de valeur personnel non mesurable ni consolidable, donc irrésolvable collectivement,
2. Le projet politique est indépendant et inadapté à cet insatisfaisant disparate et, puisque partisan, il ne peut pas constituer une réponse consensuelle à un attendu collectif, de surcroît, non formulé ni circonscrit par des repères mesurables, donc inatteignables,
3. La représentation, requise par l’idée même de démocratie, ne dispose pas de la confiance nécessaire à son mandat du fait de l’approximation étriquée de sa construction, de sa responsabilité illisible et de la volatilité des opinions chahutées par les émotions déclenchées par les circonstances, au lieu de s’appuyer sur le discernement,
4. L’Etat et son administration ne sont pas au service de la Collectivité mais se servent de la collectivité pour assouvir leurs appétits d’existence, d’avidité et de pouvoirs en réclamant ou distribuant des privilèges ou des accommodements au gré de leurs impulsions et des émotions de l’Opinion dépendante,
5. Il n’y a pas de philosophie ni de projet pour inspirer et conduire la démocratie dans une ambition consensuelle, ni de méthode de travail pour résoudre l’insatisfaisant hétéroclite exprimé dans les manifestations pour faire converger les trois collectivités politique, administrative et citoyenne,
6. L’argent est devenu un objectif despotique, malsain et préjudiciable aux équilibres alors qu’il est un outil utile au fonctionnement du système, et plutôt bénéfique, par la croyance collective qu’il exige et l’ambition qu’il permet de déclencher. Mais il n’a pas de régulateur d’équilibre pour le contrer,
7. Il n’y a pas de pilote dans le cockpit de l’Evolution puisque nous nous fions aux mains caudines du Capitaine Hasard pour espérer le miracle que les initiatives libérales disparates sachent créer les adéquations utiles aux équilibres individuels et collectifs espérés, alors même qu’elles sont dictées par la Loi castratrice du Marché,
8. Il y a une obsolescence dans nos appétits d’éradication de l’incertitude et de l’inconfort ancrés dans nos gênes ancestraux qui nous détourne de notre capacité d’adaptation originelle qui fait que nous ne naissons pas finis pour apprendre de ce qui ne va pas, mais nous ne le faisons plus,
9. Nous ne sommes pas préparés à notre déclin puisque c’est la première fois dans l’Evolution que le berceau de la civilisation qui vient est la Terre entière et connectée et non plus une région du monde « homogène » par culture ou par domination conquise.
10. Avec l’environnement, la démographie humaine va troubler lourdement et sélectivement les équilibres espérés du berceau parce qu’il n’y a plus de régulateur d’équilibre pour contrer l’Homo Sapiens, puisqu’il faudrait, dit-on, 2,5 terres pour assurer le niveau de vie américain à tous les terriens !
Pour illustrer mon propos, je prends l’exemple dans lequel je prétends qu’il n’y a pas de pilote dans le cockpit de l’Evolution : Posez-vous la question de savoir par quel heureux concours de circonstances doit-on devoir pouvoir espérer l’adéquation du nombre d’emplois disponibles, générés par l’initiative individuelle et dont, de surcroît les prétextes sont souvent la production de besoins éphémères ou concurrentiels, avec le nombre de demandeurs d’emplois générés par « l’initiative » individuelle et dont, de surcroît, les compétences ont été acquises selon les envies et initiatives individuelles ?
Si l’objectif est de donner un emploi à tout le monde pour que chacun puisse s’épanouir et vivre raisonnablement et décemment, il me semble que de continuer à confier au Capitaine Hasard les clés de cette adéquation, soit l’une de ces désespérantes désillusions que je liste. N’est-il pas ?
Non, ne montez pas aux créneaux, croisés de la Liberté, au lieu de s’indigner, construisons-nous des réponses et donnons-nous des lieux sains : plan, do, check, act ! (Deming)
Gérard Leidinger
Auteur de la Déconomocratie (édition les 3 Colonnes)